La Tenure Foncière Coutumière Dans Un Monde Moderne

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La Tenure Foncière Coutumière dans un Monde ModerneLes Droits aux Ressources en Crise : État des Lieux de laTenure Coutumière en Afrique – Essai # 1 sur 5Dossier sur l’État des Lieuxde la Tenure Coutumière enAfrique1.Monde ModerneMise en Perspective des4.actuelle. Une des conclusions les plus importantestenure foncière moderne en Afrique. Elle présenteest que cette forme de tenure est non seulementune analyse récente du statut des droits fonciersprédominante sur le continent, mais également biencoutumiers en Afrique subsaharienne. L’objectif devivante. Cela ne s’explique pas seulement par le fait20cette série est d’informer et d’aider à structurer lequ’elle soit communautaire et, par conséquent,Réformes Foncières enplaidoyer et les actions contestant la faiblesseadaptée aux préoccupations des communautésAfrique : Une Nouvellejuridique des droits fonciers coutumiers dans deactuelles. Les changements au sein de la tenureÉvaluationnombreux pays africains.foncière coutumière reflètent aussi souvent desSiècletendances inégalitaires, telles qu’une stratificationLe Statut des DroitsFonciers Coutumiers enAfrique Aujourd’hui5.Cet essai est le premier d’une série sur laPolitiques Foncières duème3.Liz Alden Wily*La Tenure FoncièreCoutumière Dans un2.JANVIER 2012La Course Mondialeau Foncier : QuellesImplications Pour lesDroits Coutumiers ?RRI PARTNERSLes cinq essais se concentrent sur le statut de lasociale rapide et la concentration de la propriététenure des ressources de nature collective, telles quefoncière. Ces tendances non seulement menacent lesles forêts, les pâturages, les marais, et autres terresdroits de la majorité pauvre ; elles ont également denon cultivées. Les gouvernements considèrentplus en plus un impact direct sur les ressourcessouvent ces terres comme des terres publiques sanscommunautaires locales, telles que les forêts. Lesmaître ou comme des propriétés de l’État, ce qui lesdéfenseurs de ces droits doivent chercher à s’assurerrend particulièrement vulnérables à la perteque les réformes foncières sont menées en gardant àinvolontaire. Cette série d’essais part du principe quel’esprit les intérêts des majorités pauvres.la plupart de ces terres appartiennent de façonlégitime aux communautés rurales, conformémentACICAFOCaux normes coutumières. Ce conflit de revendication1. Qu’est-ce que la tenure foncièrecoutumière?et d’intérêt affecte de façon directe la plupart desAfricains résidant en zone rurale, dont 75% viventLa tenure signifie la propriété foncière. Le termetoujours avec moins de 2 dollars par jour . Commede tenure foncière coutumière renvoie aux systèmesl’affirment les agences internationales depratiqués par la plupart des communautés africainesdéveloppement, plus un ménage est pauvre, plus saen milieu rural pour faire valoir et organiser ladépendance vis-à-vis des ressources naturellespropriété, la jouissance et l’accès, et pourhors-exploitation est importante . Tout aussiréglementer l’utilisation et le transfert.important, de nombreux Africains en situation deContrairement aux régimes de propriété foncièrepauvreté et vivant en milieu rural n’ont plusintroduits, les règles de la tenure coutumièresuffisamment accès aux terres agricoles pourdécoulent de, et sont maintenues par la communautécompenser la perte des terres collectives.elle-même, plutôt que par l’Etat ou par le droit12national (tenure foncière statutaire). Bien que lesDans ce premier essai, nous dressons unportrait général de la tenure foncière coutumièrerègles auxquelles adhère une communautéspécifique soient connues sous le nom de droit* Liz Alden Wily est une spécialiste internationale des régimes fonciers et un membre de l’Initiative pour les Droits et Ressources.

JANVIER 12coutumier, elles s’appliquent rarement au-delà de cettedu produit domestique brut dépend du secteur primaire,communauté. La tenure foncière coutumière est autantet non pas des industries non-agricoles et de l’emploiun système social qu’un code juridique, d’où sa grandeurbain.résilience, sa continuité et sa flexibilité. Ce qui est capitalpour les propriétaires fonciers coutumiers actuels est deIl est possible de réaliser une estimation prudentesavoir jusqu’où la législation nationale soutient les droitsde l’étendue de la tenure foncière coutumière à l’échellefonciers qu’elle octroie et les règles en vigueur pourmondiale, en comptabilisant le nombre de personnesgarantir ces droits. Il s’agit là d’un thème majeur de cetterésidant dans les régions où les formes introduites desérie d’essais.propriété foncière n’ont pas remplacé de façonsignificative les normes autochtones. On peut ensuiteUn autre terme utilisé pour désigner la tenure foncièreréduire ce nombre en incluant seulement les populationscoutumière est celui de tenure autochtone. Cela estpauvres résidant en milieu rural, dans la mesure où lescontesté en Afrique car, bien que tous les Africains soientpropriétaires fonciers plus riches sont parmi les premiersautochtones, la Commission des Droits de l’Homme et desà abandonner leurs droits coutumiers en faveur d’unePeuples de l’Union Africaine définit les personnes(coûteuse) propriété statutaire enregistrée. En 2009, l’Asieautochtones comme étant principalement des chasseurs-(à l’exception de la Chine), l’Amérique latine et l’Afriquecueilleurs et des éleveurs . Cette catégorie comprendcomptaient plus de deux milliards de personnes résidantenviron 25 millions de personnes en Afrique subsaharienne,en milieu rural, dont 428 millions en Afriquesoit seulement 6% des Africains qui, aujourd’hui, régissentsubsaharienne. Cela peut servir de guide pour évaluer leleurs relations foncières grâce aux règles coutumières.nombre minimum de propriétaires coutumiers queDans ce dossier, tous les Africains sont considérés commecompte l’Afrique subsaharienne aujourd’hui. Lorsque l’onautochtones. Aussi, les termes « coutumier » et « tenureinclut les propriétaires coutumiers mieux lotis, onindigène » sont utilisés de façon interchangeable.obtient plus d’un demi-milliard de personnes4. Un3nombre croissant d’occupants fonciers coutumiers neLA TENURE FONCIERE COUTUMIÈRE EST UNSYSTÈME DE PROPRIÉTÉ TERRIENNE MAJEURA L’ÉCHELLE MONDIALE.possède pas, ou pas suffisamment, de terres agricoles. Lestatut de leurs ressources collectives est, par conséquent,d’autant plus important.Le secteur coutumier couvre une superficieimmense5. Un indicateur de son étendue peut être2. Quelle est l’étendue de la tenurefoncière coutumière ?obtenu en excluant de la superficie foncière totale lespropriétés titrées dans le cadre du droit statutaire. Laplupart des propriétés possédant un titre sont situéesLa tenure foncière coutumière ou autochtone est undans les villes, lesquelles représentent moins d’1% de lasystème de tenure majeur à l’échelle mondiale. Elle ne sesuperficie foncière en Afrique subsaharienne6. Le nombrelimite pas à l’Afrique. En effet, la tenure foncièrede parcelles rurales possédant un titre est étonnammentcoutumière est utilisée dans les économies industrielles,bas, bien que ces parcelles recouvrent d’immensespour régir par exemple les biens communs ruraux enterritoires principalement au Zimbabwe, en Namibie et,Espagne, au Portugal, en Italie, en Suisse et dans lestout particulièrement, en Afrique du Sud (les anciennesterritoires appartenant aux minorités autochtonesexploitations des fermiers blancs). Entre un quart et und’Europe, d’Amérique du Nord et d’Océanie. Le systèmetiers de la superficie du Kenya et 12 à 15% de la superficieopère largement dans les économies agraires, c’est-à-direde l’Ouganda bénéficient d’un titre foncier légal. Ailleurs,dans les sociétés où la majeure partie de la population etles terres rurales titrées représentent généralement 1 à

32% seulement de la superficie du pays. En dépit de laprogression récente de la délivrance de titres fonciers enmilieu rural en Ethiopie, à Madagascar, au Rwanda et enNamibie, le processus se concentre seulement sur lesLE DOMAINE COUTUMIER POSSÈDE UNEDIMENSION À LA FOIS SOCIALE ET PHYSIQUE– LA PREMIÈRE POUVANT S’ÉTENDRE AU SEINDES ZONES URBAINES.fermes familiales et exclut les biens communs. Celasignifie que seules des superficies relativement petitessont incorporées au droit non coutumier.Mozambique (7 millions d’hectares). La majeure partieLa majeure partie du secteur coutumier est définiedes 1,4 milliard d’hectares de terres rurales restantes noncomme terres publiques, étatiques, nationales outitrées est revendiquée par l’Etat, bien que certainesgouvernementales, et non pas comme appartenant à dessoient délimitées en tant que terres en fiducie, terrespropriétaires coutumiers. Au sein de ce secteur, près detribales, zones de terroir, ou autres catégories foncières300 millions d’hectares de réserves forestières etqui reconnaissent au moins le fait que l’occupation etfauniques et de parcs sont complètement exclus dul’utilisation coutumières prédominent dans ces régions.secteur coutumier. En effet, leur création entraînenormalement l’abrogation des intérêts coutumiers aubénéfice de l’Etat. Dans la plupart des pays francophones,3. Dans quelle mesure est-il possibled’identifier le domaine coutumier?lorsqu’une réserve nationale est créée, la terre devientautomatiquement propriété privée de l’Etat.Les domaines coutumiers sont rarementhomogènes. Les parcs et les concessions minières,Même en excluant les réserves forestières etagricoles et d’exploitation du bois d’œuvre créent defauniques, les terres urbaines et les propriétés privées, legrands « trous » au sein du domaine coutumier. Lorsquedomaine coutumier – dont l’accès et les droits sont régisdes agriculteurs plus riches obtiennent un titre statutairepar les normes communautaires (c’est-à-dire par la tenureformel pour leurs exploitations, ils éliminent le titrefoncière coutumière) – représente potentiellement 1,4coutumier et créent ainsi de petits trous au sein desmilliard d’hectares. Etant donné que 12 à 14 millionsterres communautaires.d’hectares seulement sont cultivés de façon permanenteen Afrique subsaharienne, on peut avancer avec certitudeLes contours des domaines coutumiers sontque la majeure partie du secteur coutumier comprendégalement flous, particulièrement là où ils sont attenantsdes forêts, des pâturages et des marais non cultivés. Onaux villes africaines qui se développent et se multiplientpeut désigner ces terres sous le nom de biens communsà toute allure. Les chefs de village ou les agriculteursde la tenure coutumière – c’est-à-dire ces biens, au seinvendent régulièrement des terres à des développeurs auxdu secteur coutumier, qui n’appartiennent pas et ne sontabords des villes, ou se les font prendre.7 Certainespas utilisés par des individus ou par des familles, maiscommunautés rurales conservent le contrôle sur despar tous les membres de la communauté.terres urbanisées. A titre d’exemple, c’est en partie le casà Accra, la capitale du Ghana, où les transactions dans lesLes législations foncières nationales reconnaissentquartiers périphériques sont réalisées officiellementpeu de biens communs comme étant propriété desselon les règles coutumières et sous l’égide descommunautés. Les exceptions comprennent les terressecrétariats coutumiers dirigés par les chefs.8 Lesvillageoises de la Tanzanie continentale (environ 60personnes pauvres résidant dans les zones rurales ontmillions d’hectares), les terres familiales et de chefferieégalement couramment recours aux normes coutumières(stool, skin, and family lands) du Ghana (18 millionspour garantir et authentifier l’occupation au sein desd’hectares) et les régions communautaires délimitées dubidonvilles et des implantations urbaines informelles.9

JANVIER 12La pratique, courante à travers le continent, quirésidentielle ou ethnique. Des questions similaires seconsiste à migrer vers les villes tout en conservant desposent concernant la signification des terres ancestralesterres et des droits fonciers dans son village d’origine,au Kenya13. En Afrique, on opère une distinction de plusaccroît le flou des contours sociaux et physiques duen plus grande entre les membres absents et lesdomaine coutumier. L’influence et la richesse du secteurmembres résidants d’une même communauté rurale – lesurbain influent souvent sur les coutumes foncières desseconds possédant des privilèges supérieurs auxvillageois. Ce phénomène apparaît nettement lorsque lespremiers concernant l’utilisation des biens communs etmembres urbains d’une communauté ont acquis assezles bénéfices générés par ces derniers.d’influence pour se tailler des exploitations au sein desbiens communs, et les enregistrent comme propriétéprivée afin d’en garantir la sécurité selon le droit national4. Pourquoi les régimes coutumierspersistent-ils?et être en mesure de revendre ces parcelles à d’autres,sans tenir compte de la position de la communauté à ceAu cours du siècle dernier, en Afrique et ailleurs, unsujet . Des tensions peuvent également survenir lorsquelarge consensus existait (particulièrement à partir desde riches villageois résidant en ville envoient un nombreannées 1950) en faveur de la disparition de la propriétéimportant de bétail dans leur village natal, consommantfoncière et de la gouvernance coutumières14. De touteainsi une part disproportionnée des pâturages au seinévidence, il n’en est rien. Toutefois, le secteur a connu undes biens communs . La course mondiale à la terre (voirimportant effritement lié à:1011l’essai numéro 5) stimule cette forme d’accaparementdomestique de terres pour le profit, accélérant à son toura.l’empiètement chronique, à partir des années 1890, liéla concentration foncière et l’introduction de normesà l’accaparement des terres pour l’installation desdéfinies par le marché, et faisant pression sur lescolons blancs, aux projets de développement duressources communes12.gouvernement et du secteur privé (notamment pourle caoutchouc, le coton, le sisal et les culturesvivrières) et à l’expansion plus récente des projetsEN DÉPIT DE L’EMPIÈTEMENT CONTINU ET DEagricoles, de biocarburants et d’échange de carbone ;LA SUPPRESSION DES DROITS, LE SECTEURCOUTUMIER DEMEURE SOLIDE ET ACTIF.b.la confiscation, par l’État, de forêts, de pâturages etde marais de premier choix à des fins de protection(aires protégées terrestres) ;Plus la valeur des ressources affectées est grande,plus les tensions au sujet des normes sont importantes.c.la suppression d’autres biens appartenant auxPar exemple, on ne sait pas très bien si les villageoispropriétaires fonciers coutumiers, suite à lalibériens accepteront que les membres de leur village, quinationalisation de l’eau, des lais, des minerais, duvivent de façon permanente à Monrovia (ou dans d’autrespétrole, de la faune sauvage et, souvent, des forêtsvilles), reçoivent une part du loyer et des redevancesou du moins des arbres poussant sur ces terres ;qu’ils espèrent toucher des concessions de bois. Mêmeles populations autochtones d’Amérique du Nord,d.la suppression des droits coutumiers par le biais ded’Europe, d’Australie et de Nouvelle-Zélande, qui sontpolitiques et de lois qui considèrent que ces droitsencore plus dispersées et urbanisées, doivent faire faceont un statut inférieur à celui de la propriété, et ;elles-aussi à ce problème, lequel soulève des questionscomplexes sur le fait de savoir dans quelle mesure lapropriété coutumière doit être définie sur une basee.les programmes de délivrance de titres fonciersélaborés pour remplacer les intérêts coutumiers par

5des formes introduites de tenure européennepréfèrent avoir recours aux coutumes communautaires(principalement des droits de pleine propriété et delocales pour réglementer les transferts et l’utilisation delocation à bail).la terre. La plupart d’entre eux n’ont même pas récupéréleurs actes et/ou enregistré le changement de propriétéParmi les raisons qui expliquent l’échec de ladisparition du régime foncier coutumier, on peut citer:depuis. Néanmoins, l’évolution de la propriété desexploitations en faveur d’un droit individuel et absolu aunom des chefs de famille (généralement des hommes) aa.l’écart entre ce que dicte le droit national et laentraîné la disparition de millions de droits détenus parréalité sur le terrain, comme l’illustre très bien lales femmes et membres de la famille. La bureaucratie et lasuperposition des tenures nationale etcorruption au sein des procédures et des registrescommunautaire sur les terres publiques;fonciers ont sérieusement sapé la soi-disant inviolabilitédes droits enregistrés sur laquelle repose le systèmeb.la reluctance, avec des exceptions notables (parstatutaire. Aussi, de nombreuses communautés ont plusexemple le Rwanda et l’Erythrée), des gouvernementsconfiance dans les normes coutumières pour garantir laafricains à éliminer officiellement les droitssécurité foncière.coutumiers en tant que catégorie, et préférant plutôten réinterpréter la signification. Cela permet auxnormes et aux intérêts coutumiers de perdurer,LA POSITION JURIDIQUE FACE AUX DROITS ETjusqu’à ce qu’ils entrent en conflit direct avecAUX RÉGIMES COUTUMIERS EST EN TRAIN DEl’arrivée d’intérêts étatiques ou du secteur privé ;c.CHANGER.la portée limitée des programmes de délivrance detitres de propriété, et ;Ceci tient au caractère social des normes foncièrescoutumières, ce qui les rend accessibles, en grande partied.la pertinence, à ce jour, des normes coutumièresgratuites (exception faite des paiements aux chefs pourquant aux modèles de mise en valeur de la terre etla location des terres et autres services)16 etaux droits fonciers, et la façon dont ils sontindissociables des réalités de l’utilisation actuelle desintimement imbriqués avec les relations sociales.terres. L’arbitre des normes est toujours la communauté,laquelle est évidemment très sensible à l’altération desOn peut citer l’exemple des politiques foncières et deconditions qui influencent les moyens d’existence qu’elledélivrance de titres de propriété du Kenya15. Bien que,tire de la terre. Bien que la question de la responsabilitédepuis 1922, les administrations aient joui de lapuisse poser problème, la communauté conserve le« propriété racine » (root ownership) et du contrôle sur lescontrôle, plutôt que d’abandonner celui-ci aux autoritésterres coutumières, cela se faisait en théorie dans l’intérêtgouvernementales, souvent inaccessibles et peu fiables,des occupants ; dans les faits, cependant, ceux-ciet dont les services sont payants. L’enchevêtrement deconféraient aux administrations les pouvoirs légaux pournormes coutumières et la mise en valeur effective de ladisposer des terres à leur gré. Le programme qui a débutéterre fournissent également une plus grande nuance etdans les années 1960 pour convertir l’occupation en droitsflexibilité. Les communautés sont plus à même de faire lade pleine propriété n’a pas été un franc succès : moinsdifférence entre les droits fonciers (par exemple ded’un tiers de la superficie du pays a été concerné, laissantdistinguer entre droits « premiers » de propriété et droitsles autres locataires coutumiers incertains de leurs droits.dérivés d’accès), ce qui peut s’avérer nécessaire pourMême ceux qui ont obtenu un titre de propriété grâce auréglementer l’accès saisonnier entre les éleveursprogramme obligatoire d’enregistrement fonciernomades17.

JANVIER 12Comparé aux systèmes non-autochtones, lesCes facteurs aident à transformer les perceptionsrégimes coutumiers sont également fondamentalementlégales de la tenure coutumière21. L’attribution de titresplus à même d’intégrer les aspects culturels, tels que lesde propriété foncière n’a pas été abandonnée, mais lespratiques de succession, les lieux de sépulture et laapproches diffèrent grandement. Dans certains pays,protection des bois sacrés. Les droits communautairesnotamment, il est désormais possible d’enregistrer lessur les forêts, pâturages, marais et autres ressourcesdroits coutumiers, sans qu’ils soient éliminés oupartagées sont de toute évidence inadaptés au projetremplacés par un type de tenure différent (et souventd’individualisation qui motive la conversion forcée destrès individualisé). Dans certains cas, des propriétésintérêts en droits statutaires. La capacité à conserver lecollectives, telles que les forêts et les pâturages, peuventcontrôle sur les biens collectifs influence grandement laaussi se voir attribuer un titre de propriétésolidité des normes de propriété foncièrecommunautaire22. Grâce à ces changements, les droitscommunautaire en général. Les régimes fonciersfonciers coutumiers sont en train de devenir des droitsintroduits abordent généralement ces ressources commestatutaires de propriété coutumière. Les nouvelles loissi elles étaient dépourvues de propriétaires et nefoncières du Mozambique (1992), de l’Ouganda (1998), depouvaient appartenir aux communautés. Lors dela Tanzanie (1999) et du Sud Soudan (2009) illustrentl’enregistrement des terres, comme ce fut le cas auclairement l’intégration de ce pluralisme juridique.Kenya, les biens communs sont généralement devenusL’élargissement de ces changements à l’échelle dupropriété de l’Etat, ou ont été divisés entre les membrescontinent mettrait un terme à la tentative séculaire deles plus riches de la communauté18.subordonner et de supprimer la tenure coutumière entant que forme légale de propriété foncière.D’autres raisons politiques plus récentes freinent lavolonté d’éliminer les régimes fonciers coutumiers, parmilesquelles la demande de la part du public d’un mode de5. Dans quelle mesure la propriétéfoncière coutumière est-elle archaïque?gouvernance plus démocratique et décentralisé, suite auxchangements politiques qui balaient le continent depuisUne orthodoxie majeure du 20ème siècle (défendueles années 1990. Ce type de demande a eu un impact sur lepar les anthropologues et les politologues des courantssecteur forestier, alimentant la méfiance des populationstant néo-classiques que marxistes) affirmait que leslocales quant à la légitimité ou la nécessité d’abandonnerformes autochtones de tenure découlaient d’un passéla propriété et l’administration de biens communsprécapitaliste statique et étaient, de ce fait,forestiers précieux aux gouvernements.structurellement contraires aux conditions propices àune transformation capitaliste23. C’est surtout à partir desOn s’attache également de plus en plus àannées 1950 que la propriété communautaire a étéreconnaître, ici et à l’étranger, que la sécurité de la tenurevilipendée et accusée de faire obstacle à laest un droit humain élémentaire dans une sociétémodernisation, avec les encouragements nourris desagraire, et que la subordination des intérêts fonciersbailleurs de fonds internationaux24. Comme on le sait,coutumiers est en grande partie une invention de l’EtatGareth Hardin a largement contribué à ces efforts dereposant sur la supposition honteuse que l’Afrique étaitdestruction, en confondant propriété foncière collective« vide de propriétaires » au moment de l’expansionet les régimes de libre-accès (1968)25. Ces positions ontcoloniale, puis lors de la construction d’Etats modernes19.grandement fait le jeu d’administrations postcolonialesLe droit international, sous la forme de déclarations et depromptes à s’accaparer les ressources et pouvant faireprotocoles, contribue en partie à réduire la toléranceperdurer en toute tranquillité le mythe selon lequel lesvis-à-vis de la spoliation à grande échelle, bien qu’il soitdroits de propriété foncière, tels qu’ils existaient dans leailleurs complètement inadapté20.cadre de la tenure coutumière, n’étaient légalement ni

7plus ni moins que des droits d’occupation et d’usage(“jouissance”). Les forêts et pâturages non cultivés, enparticulier, furent considérés comme étant sans maître etaccaparés par les gouvernements.TOUTES LES NORMES COUTUMIÈRES NE SONTPAS TRADITIONNELLES; NOMBRE D’ENTREELLES ONT ÉTÉ INSTAURÉES PAR LESCOMMUNAUTÉS ACTUELLES.Parfois, les communautés ont été capables dedéfendre leurs terres, non pas par la force physique, maisen influençant fortement les politiques. Un des tous(ex. Ghana, 1992). De plus, la question des prérogativespremiers exemples remonte aux années 1890, lorsque lesexcessives octroyées aux chefs a récemment été àchefs traditionnels de la côte ghanéenne empêchèrent, àl’origine du renversement d’une importante loi foncièretrois reprises, les Britanniques de s’approprier leursen Afrique du Sud pour anti-constitutionalité (2010).forêts et l’or quelles abritaient au nom de la Couronne.Pour cela, ils insistèrent sur le fait que la tenureUn autre legs de l’administration indirecte est leautochtone étant par nature communautaire, « aucunepouvoir (aujourd’hui plus démocratique) qu’exercent lesterre n’était sans propriétaire sur la Côte d’Or », pasautorités de district et de comté sur les terresmême les terres non-cultivées26. Cette stratégiecoutumières, quand bien même elles sont situées loin desfonctionna très bien : cas presque unique dans l’histoire,villages. En dépit de cela, les administrations colonialesles terres coutumières du Ghana ont été depuisont instauré une certaine équité en matière d’accès à laconsidérées comme des propriétés privées, détenues parterre au sein de certaines sociétés traditionnelles peules chefferies et les familles.équitables. Toutefois, au cours de la période coloniale,ces inégalités furent exacerbées à mesure que les élitesDe façon moins positive, la mise en œuvre à partirdes années 1920 du système de l’administration indirectelocales s’allièrent aux administrations coloniales,souvent par convoitise de la terre28.en Afrique anglophone et au Libéria et del’administration plus directe, ou Indigénat, en AfriqueUne multitude d’autres facteurs ont affecté lesfrancophone a refaçonné les normes coutumières,régimes coutumiers, de telle sorte qu’il est souventsouvent en renforçant les pouvoirs des chefs ou endifficile de déterminer dans quelle mesure le changementfaisant d’eux les propriétaires et contrôleurs de facto27.a été impulsé de l’intérieur ou de l’extérieur. La religionAujourd’hui, l’héritage de telles pratiques se lit dans lesest elle-aussi un facteur de changement, comme letensions récurrentes qui existent entre les droits desmontre très bien le fait que les normes coutumières dechefs et ceux de leurs « concitoyens », particulièrement làsuccession en Mauritanie, au Tchad et au Sénégal sontoù le droit national continue de soutenir les chefs deentièrement façonnées par la Shari’a.façon non démocratique et sans réforme. Ces tensions seconcentrent particulièrement sur le droit des leadersPlus largement, les politiques nationales, la pénurietraditionnels à disposer des terres communales, à desdes terres, l’éducation et, tout particulièrement, lafins souvent lucratives ou sans le consentement de lamarchandisation de la terre et la stratification descommunauté. La frontière est ténue entre, d’une part, lescommunautés en classes discernables de riches et dechefs propriétaires (souvent autoproclamés) de toutes lespauvres liée à la transformation capitaliste continue, ontterres régies par les lois coutumières et, d’autre part, lestous influencé la manière dont les relations foncièreschefs dépositaires et administrateurs des bienscoutumières sont façonnées et régulées. Il n’est donc pascommuns. Dans certains pays, cette question estsurprenant que la notion de ce qui constitue un droittellement disputée au sein du secteur coutumier que desfoncier coutumier se rapproche des normes de tenuredispositions constitutionnelles ont vu le jour à ce sujetstatutaire introduites, et favorise les personnes riches au

JANVIER 12A L’ÉCHELLE MONDIALE, LES POINTSh.des étrangers à bénéficier de la tenure et de l’accèsCOMMUNS ENTRE LES FONDEMENTS DEScoutumiers, à mesure que se font sentir les effets deRÉGIMES COUTUMIERS SONT FRAPPANTS.détriment des individus pauvres. Il en résultele durcissement des positions concernant le droitla pénurie des terres,i.les pressions plus fortes exercées sur les groupesfréquemment l’appropriation disproportionnée devulnérables (ex. femmes, orphelins, belle-famille etressources communautaires par les leaders, les grandsminorités ethniques) au sein des communautés,exploitants et les propriétaires de bétail .notamment concernant l’accès à de nouvelles terres29agricoles30 et,Les régimes coutumiers sont, en raison de tous cesfacteurs, particulièrement malléables et les changementsj.la moindre adhésion aux règles du passé (lesquellesqu’ils ont subis au cours des dernières décennies sontdictent qu’il devrait y avoir de la terre pour chaquevisibles à travers tout le continent africain. On peut citerfamille au sein de la communauté), conjointemententre autres :avec la polarisation de la richesse au sein descommunautés coutumières actuelles et,a.le déclin des sanctions à l’encontre de la vente desparadoxalement, des demandes de plus en plusterres familiales,fortes en faveur de l’équité, particulièrement là oùcelle-ci était absente historiquement (de nombreuxb.l’introduction de témoignages écrits lors desrégimes coutumiers, en particulier dans les régionstransactions,côtières de l’Afrique de l’Ouest, étaient loin d’êtreaussi égalitaires qu’on a coutume de le présumer).c.la transformation de l’usufruit des exploitations endroits de propriété perpétuels et absolus,Il existe de nombreuses incohérences au sein de cesparticulièrement là où les maisons et les culturestendances, souvent le fruit des politiques publiques. Parsont permanentes,exemple, suite aux pressions politiques et populaires, laLoi foncière du Lesotho de 2010 fait des femmes lesd. l’existence de décisions plus démocratiques danscopropriétaires des terres familiales, rendant par làl’exercice de la juridiction coutumière, bien que lamême difficile la distinction entre normes de propriététendance contraire s’observe aussi là où les chefsfoncière coutumières et statutaires. Récemment, lesdéfinissent et exercent leurs pouvoirs de façon plusfemmes sud-africaines ont également activementferme que ne le dicte la coutume,contribué à modifier la

LA TENURE FONCIERE COUTUMIÈRE EST UN SYSTÈME DE PROPRIÉTÉ TERRIENNE MAJEUR A L’ÉCHELLE MONDIALE. 2% seulement de la superficie du pays. En dépit de la progression récente de la délivrance de titres fonciers e

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