Une Écoute Sous La Lumière De Dieu

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dossierDOSSIER N 209Accompagnement spirituelUNE ÉCOUTESOUS LA LUMIÈREDE DIEUDossier réalisépar André Kermarrecet Gabriel de SevinUne vie de chrétiens ne s’improvise pas. Elle cherche à se conformer à la parole du Christ,à vivre de l’Eucharistie, à agir en fonction des dons que nous avons reçus. Pourtant, il nousarrive de faire fausse route, de nous focaliser sur des objectifs qui ne sont pas ceuxde l’Évangile, et de sacrifier à des tentations, à des veaux d’or qui nous éloignent du Seigneur.Quel que soit notre statut, prêtre, diacre, consacré ou laïc, il est bon de nous faireaccompagner spirituellement par quelqu’un qui nous aide dans notre vie intérieureet qui peut attester que nous nous dirigeons sur une route qui correspond à notre vocation« Il est souvent nécessaire de faire cette lecture devant un témoin, écrit Jean Gouvernaire, s.j.,dans Mener sa vie selon l’Esprit. D’abord parce que le fait même de s’exprimer dissipeles illusions. Ensuite parce qu’un témoin expérimenté peut aider à discerner, dans la nuitla plus obscure, quelques points lumineux qui, une fois nos yeux habitués, sont autantde repères pour certifier que Dieu est là et pour éclairer le reste de ma route. »Les différentes personnes qui ont accepté de contribuer à ce dossier ont l’expériencede l’accompagnement : elles savent que c’est un chemin exigeant tant pour elles que pourcelles qu’elles accompagnent. Mais ce chemin est source de joie et de paix : il nous permetde demeurer en Jésus-Christ, comme dit saint Jean, et même « de réaliser des œuvres plusgrandes que celles qu’il a pu accomplir lui-même » (Jn 14, 12). 9

DOSSIER L’accompagnement spirituel, une écoute sous la lumière de DieuL’APPORTde Jean-GuilhempsychanalysteXerri,Intérioritéet serviceJean-Guilhem Xerri est psychanalyste et biologiste médical,diplômé de l’Institut Pasteur et de l’École supérieure de commercede Paris. Il a participé à plusieurs missions nationales sur la santéet l’exclusion. Il est passionné par la spiritualité des Pères du désertet a publié plusieurs essais, dont À quoi sert un chrétien ?en 2015 (prix Humanisme chrétien), Prenez soin de votre âmeen 2018, et Revivez de l’intérieur en 2020.Les missions sont multiples, maistoutes partent d’un même événement.Et cet événement, c’est la résurrectiondu Christ. Saint Augustin l’affirme :« La foi des chrétiens est la résurrectiondu Christ. » Quelles que soient lesactivités pastorales, c’est lui que nousavons à annoncer, à proposer, à donnerau monde parfois de façon explicite, àd’autres moments seulement silencieusement, dans le secret de notre cœur.Si c’est donc le Christ vivant qui està annoncer, l’enjeu de la mission estalors de le fréquenter, d’être familieravec lui, comme on peut l’être avecun ami. Les moyens sont nombreux :la Parole, la liturgie, les sacrements,le service des autres. Et il y a une voieroyale, c’est la vie intérieure. Dans uneperspective chrétienne, l’intériorité estle lieu d’une expérience spirituelle derencontre, et non pas une mode ou uneréalité dont un missionnaire pourrait sedispenser. Dans la tradition de l’Église,l’expérience intérieure conduit à cesser de considérer la foi comme unerelation avec un Être extérieur à nousqui s’ajoute à notre existence pour laconforter, la diriger, la surveiller ou lajuger. Le Tout-Autre, qui serait le ToutExtérieur, se révèle alors le Tout-Intimeà nous-mêmes. Dieu n’est pas dans unailleurs ou un autre monde, mais enplein cœur de l’humain. Comme le ditDietrich Bonhoeffer, dans l’intérioritéde l’homme Dieu se révèle comme un« au-delà au cœur de notre vie »1. Plusque de comprendre, il s’agit de se laisser prendre par le Christ, saisir par lui,comme l’a expérimenté l’apôtre Paul :« J’ai moi-même été saisi par le ChristJésus » (Ph 3, 12).Pas de missionsans vie intérieureavec le ChristNous ne sommes pas dans l’ordre d’uneréflexion, d’une recherche rationnelleou d’une objectivation mentale, maisd’un chemin de transformation et dematuration qui amènent vers des relations aux autres plus empreintes de gratuité et de service, inspirées par Dieu.Entretenir une vie intérieure, c’est progressivement nous ouvrir à notre originedivine et nous rapprocher de l’empreintedivine inscrite en nous. L’intériorité estcet espace de rencontre avec la Sourcequi nous habite. Elle correspond aumouvement des premiers disciples duChrist, décrit par l’évangéliste Jean :« Ils demeurèrent avec lui » (Jn 1, 39).1. Dietrich Bonhoeffer, Résistance et soumission, p. 332, Éd. Labor et Fides, 2006.10 diaconat aujourd’hui n 209Le recueillement nous conduit à unseuil, au « seuil de notre cœur » commeen parle la Bible, au « centre le plus profond de nous-mêmes » pour reprendrel’expression de saint Jean de la Croix,à « notre chambre retirée » pour redireles mots de Jésus. Ce lieu, au-delà dumental, est celui où chacun est vraiment soi-même, en profondeur, sansartifice ni masque. Cet espace où setrouve « l’homme caché au fond de notrecœur »4 comme le dit l’apôtre Pierre(1 P 3, 4). Et c’est là que peut se produire l’ouverture à la réalité divine, quepeut se faire l’expérience d’un Dieupersonnel.Pas de mission sans vie intérieure avecle Christ car rien de ce que le chrétienannonce ne lui appartient. Tout lui estdonné. Il s’agit de transmettre ce quiest contemplé dans la prière. Ce qu’ilannonce, il l’a reçu de Dieu et cettetransmission de la Parole de vie nepeut naître que dans la prière, pour lemonde. En résumant à l’excès, la viede disciple tient en deux assertions« intériorité » et « service », formuléautrement cela donne « proximité avecle Christ et charité ».

 CORINNE MERCIER/CIRICTout chemin spirituel peutêtre traversé d’illusions,de vanité, de tentationsou de résistances.Nul ne peut s’aventurersur la voie spirituelle sans bénéficierdu regard d’une personne tierce.L’objectif est de sortir de sa propresubjectivité et de recevoir les conseilset encouragements appropriés.Prier, qui est, d’une certaine façon, leverbe d’action de l’intériorité chrétienne, est le premier acte de la mission. Le chrétien peut tout à la foisy être converti, éclairé et dynamisé.Par cette rencontre intime avec Dieuque la prière permet, nous sommesévangélisés et nous recevons le dynamisme de la mission : « Comme le Pèrem’a envoyé, moi aussi, je vous envoie »(Jn 17, 18). Il s’agit de se rendre toujours plus disponible à l’Esprit Saintet de se laisser inspirer, conduire parlui. Se mettre sous sa mouvance estimpératif pour que le chrétien fassesienne la parole de Jésus : « Non pascomme je veux, mais comme tu veux »(Mt 26, 39).La mission est d’autant plus authentique qu’elle trouve sa source dans laprière, prière en tant qu’elle est le lieude l’écoute. En effet, Jésus expliquesans aucune équivoque à ses disciplesque la source de la fécondité se trouvedans la proximité avec lui. Dans l’évangile selon saint Jean, il nous invite àcette intimité : « Demeurez en moicomme je demeure en vous » (Jn 15, 4).Immédiatement après, il indique quecette compagnie est la source de lafécondité : « Celui qui demeure en moiet en qui je demeure, celui-là donnebeaucoup de fruit » (Jn 15, 5). Il poursuit, afin qu’il ne puisse pas y avoir demalentendu, en reformulant sous formenégative pour préciser l’origine de lastérilité : « Si quelqu’un ne demeurepas en moi, il est comme un sarmentqu’on a jeté dehors, et qui se dessèche »(Jn 15, 6). Cette hospitalité réciproque,du Christ et de l’orant, est rendue possible par l’écoute. « Écoute, mon fils,prête l’oreille de ton cœur », inscrit saintBenoît, père du monachisme d’Occident, dans le prologue de sa Règle.C’est donc par l’écoute d’une paroleque la prière est source de la mission.Seul celui qui fréquente la parole deDieu peut en parler. Seul celui qui alaissé Dieu s’approcher de lui dans lesilence peut répandre cette intimité.Un acte d’humilitéSe mettre à l’écoute du Christ pour enrecevoir le dynamisme et la Vie, voilàl’un des enjeux de la vie intérieurepour la mission. Mais prudence ! Latradition de l’Église souligne combientout chemin spirituel peut être traverséd’illusions, de vanité, de tentations oude résistances. C’est pourquoi nul nepeut s’aventurer sur la voie spirituellesans bénéficier de l’expérience d’unaîné ou du regard d’une personne tierceelle-même enracinée dans le Christ.L’objectif est de sortir de sa propre subjectivité et de recevoir les conseils etencouragements appropriés. Saint JeanClimaque, Père du désert, avertit : « Ilssont dans l’illusion, ceux qui se fient àeux-mêmes et pensent n’avoir besoin depersonne pour les conduire. » (L’Échellesainte I, 18). Dans le fond, s’ouvrir àun accompagnateur, c’est poser un acted’humilité.Une vie intérieure produit des fruitsmultiples : simplification intérieure,unification, décentrement. Par la fréquentation du Christ, elle nous rendplus humbles, plus serviteurs, plusdiaconaux. diaconat aujourd’hui n 209 11

DOSSIER L’accompagnement spirituel, une écoute sous la lumière de DieuL’APPORTd’ Yves Le Thérisien,responsable des parcours de formation à l’accompagnement spiritueldans le diocèse de Quimper-LéonL’accompagnementun chemin de libertYves Le Thérisien, marié, père de famille, a été délégué diocésain pour l’animation spirituelledu diocèse de Quimper-Léon. Il est aujourd’hui responsable dans les parcours diocésains de formationà l’accompagnement spirituel. Il insiste sur l’importance de la formation des accompagnateurspour que chacun puisse faire route avec le Christ. Il est par ailleurs membre de la communauté Viechrétienne.Les périodes incertaines que sontles nôtres, où les repères s’étiolent,voient croître les demandes d’accompagnement en tous genres, de coaching. Nombre de nos contemporainscherchent une aide pour mener leur vie,trouver un sens à l’existence, cheminersur une voie spirituelle Aider à repérerla présence de Dieudans nos viesLa tradition chrétienne porte, depuis lesorigines, ce désir d’aider les hommes etles femmes dans leur vie et leur quêtede Dieu. De Jésus jusqu’à nos jours,les Pères du désert, les fondateurs defamilles spirituelles, des frères et sœursse succèdent pour prendre soin de leurscongénères en les écoutant, en cheminant avec eux. Autrefois on parlait dedirection spirituelle, aujourd’hui oninsistera davantage sur le compagnonnage fraternel : il s’agit clairement d’aider à repérer la présence de Dieu dansl’existence afin de grandir en libertéet en autonomie dans une vie ancréedans la foi.Mettre nos viesen perspective avecla parole de DieuIgnace de Loyola propose dans sesExercices spirituels des pistes nourrissantes pour avancer dans la manièrede faire ses choix. Son expérience12 diaconat aujourd’hui n 209personnelle l’a amené à considérer quel’être humain est animé de mouvementsintérieurs, ou motions, dont le repéragepeut être considéré comme une boussole sur l’itinéraire de vie. L’examendes états intérieurs, furtifs ou permanents (peur, tristesse, découragement,joie ou autre) éclaire la personne et luirévèle son être profond et la nature descombats qui s’y mènent. Il peut alorss’engager dans un véritable discernement, à la lumière de la parole de Dieuet si possible dans un dialogue avec sonaccompagnateur spirituel. Ce dernier« laisse le Créateur agir immédiatementavec sa créature et la créature avec sonCréateur et Seigneur » (Exercices spirituels 15) mais aide à repérer les motionset à les mettre en perspective avec laparole de Dieu, travail indispensablepour éviter des impasses où l’aveuglement peut mener.L’accompagnateur va permettre la prisede distance de l’accompagné vis-à-visdes situations, par une attitude d’abordancrée dans la contemplation de sa vie.Comme le dit si bien saint Ignace, « cen’est pas en savoir beaucoup qui rassasiel’âme, mais goûter et sentir intérieurement ». Il est alors possible à l’accompagné de regarder ce qui se passe en luiréellement, aidé en cela par un travailde relecture de vie. Ainsi, l’accompagnement spirituel lui permet la mise enœuvre de trois attitudes essentielles :l’écoute de soi, celle du monde et celledes Écritures. Et par là même de mettredes mots sur ce qui l’habite. Il pourraensuite mettre en œuvre ses décisionsdans le concret de sa vie.Aider à croîtreen liberté en dehorsde toute empriseCette croissance dans la liberté estun des enjeux de l’accompagnement.Ce mot « liberté » recouvre souventsournoisement des situations d’asservissement à des réalités qui ne fontpas grandir. Ainsi, le besoin de ne pasavoir de contraintes peut masquer pourla personne des réalités d’addictions oud’influences toxiques. Chacun est plusou moins conditionné par son environnement, son histoire, des dominationsdiverses. Il faut démêler le bon grainde l’ivraie, c’est une tâche permanenteet il est très difficile d’y aboutir seul.L’accompagnateur ne donne jamais desolution ou ne force pas les choix, maisil propose un itinéraire spirituel à partirduquel l’accompagné trouvera sa propreréponse éclairée. Celle-ci correspond àla nature profonde de la personne, àpartir de là où elle en est réellement,et non pas ce qu’elle peut rêver d’être.L’accompagnateur, dans une attitudebienveillante, pourra révéler, surtouts’il s’agit d’une épreuve à traverser,l’amour inconditionnel du Christ quipermet de se relever ou de redémarreraprès un échec.

spirituel :téDes événements récents ont révélé dessituations d’emprise à la suite d’accompagnements et les instances ecclésialesproposant ces services ont à cœur deles baliser. Ces situations d’emprisetrouvent leurs racines dans uneconfiance établie dans la foi, nécessaireà la relation d’accompagnement pourune ouverture du cœur. Cette confianceest alors dévoyée sous le prétexte dubien et souvent grâce à une positiond’autorité morale ou spirituelle. Ainsi,la position asymétrique de l’accompagnateur vis-à-vis de l’accompagnépermet de porter du fruit, mais c’estaussi le lieu d’une dérive possible. Ilimporte donc qu’un accompagnateur,quel qu’il soit, soit lui-même accompagné et supervisé individuellement oudans des groupes de relecture.Se formerest indispensableà l’art de l’écouteCe service souvent assuré par des prêtreset religieux est aujourd’hui égalementmené par des laïcs appelés et formés,car ce charisme d’écoute spirituelleest baptismal. Cette notion d’appel estessentielle car on ne s’autoproclamepas accompagnateur, on est envoyé etreconnu par la communauté ecclésiale.Des diacres également y sont conviés àla suite d’un des leurs évoqué dans lesActes des Apôtres : Philippe traversantla route de l’eunuque éthiopien pourlui commenter la parole de Dieu (Ac8, 26-40). Il est pleinement dans sonservice de frère : conseiller ceux quisont dans le doute comme il est indiqué dans une des œuvres de miséricorde. Ce beau texte d’accompagnement n’est pas sans rappeler celui desdisciples d’Emmaüs (Lc 24, 13-35)où Jésus lui-même donne une leçond’accompagnement par sa discrétion,sa sagesse et son amour inconditionnelqui va ouvrir les yeux et le cœur desdisciples qui devient « tout brûlant ».Ces textes nous révèlent magnifiquement la visée de l’accompagnement spirituel : une rencontre ternaire profondeentre l’accompagnateur, l’accompagnéet le Christ. Ce service vécu dans ladiscrétion est capital pour pallier leserrances spirituelles de beaucoup denos contemporains et notamment desjeunes. Il importe que les diacres quien ont le charisme se forment dansles cursus que proposent la plupartdes diocèses ou des centres spirituelset se rendent disponibles. Le papeFrançois nous y encourage : « L’Églisedevra initier ses membres – prêtres, personnes consacrées et laïcs – à cet “artde l’accompagnement”, pour que tousapprennent toujours à ôter leurs sandalesdevant la terre sacrée de l’autre (cf. Ex3, 5). [ ] Plus que jamais, nous avonsbesoin d’hommes et de femmes qui, àpartir de leur expérience d’accompagnement, connaissent la manière de procéder où ressortent la prudence, la capacitéde compréhension, l’art d’attendre, ladocilité à l’Esprit, pour protéger tousensemble les brebis qui se confient ànous, des loups qui tentent de disperserle troupeau. Nous avons besoin de nousexercer à l’art de l’écoute, qui est plusque le fait d’entendre. » (pape François,Evangelii Gaudium 169). diaconat aujourd’hui n 209 13

DOSSIER L’accompagnement spirituel, une écoute sous la lumière de DieuLE REGARDde Sr Marie-Simone,religieuse accompagnatriceSr Marie-Simone est religieuse : elle vit dans une communauté qui l’amène à rencontrerde nombreuses personnes venues à elle soit parce qu’elles sont en détresse spirituelle,soit parce qu’elles désirent être accompagnées pour mieux correspondre au chemin d’amourde Dieu sur leur vie. Sr Marie-Simone, dont le nom en religion a été changé par souci de discrétion,nous livre un peu de sa très riche expérience.Faire mémoireet rendre grâceAvoir la foi relèved’unegrâcereçue. Dieu se faitconnaître. Dieuappelle à le suivre.L’accompagnementspirituel est un lieu de transmissionprivilégié qui fortifie la foi. Plus lasoif est ardente, plus la recherche d’unaccompagnateur spirituel s’imposecomme une nécessité pour avancer surle chemin de la vie spirituelle, pourconnaître Dieu et se connaître sousson regard.Accompagneren toute humilité« Comprends-tu ce que tu lis ?Comment le pourrai-je si quelqu’un neme guide ? » (Ac 8, 31).Il est bon de choisir une personne plusexpérimentée qui a déjà fait le chemin, pour être guidé en sûreté. On nes’arroge pas ce rôle. Le Seigneur confietel de ses enfants, être unique et précieux. Ayons-en conscience : « Retiretes sandales de tes pieds car le lieu où tute tiens est une terre sainte » (Ex 3, 5).Dieu est présent, il invite à seconderle travail de l’Esprit par une écoutepriante, respectueuse.L’Église confirme cette mission par lesvoies d’autorité dont chacun dépend.Accompagner, c’est devenir serviteur de l’œuvre de Dieu dans lescœurs, dans l’obéissance et l’humilité. Accepter ce service avec crainte14 diaconat aujourd’hui n 209et tremblements est une lourde responsabilité. Ne nous plaçons jamaisen position de toute puissance, ou envoulant nous approprier quoi que cesoit d’une réussite.Expérience féconde vécue par l’accompagnateur qui redonne gratuitementce que lui-même a reçu gratuitement.Il connaît une profonde joie à enfanter à une maturité spirituelle, à uneliberté intérieure, et il s’émerveilled’être témoin de l’œuvre de Dieu. « Ilfaut qu’il grandisse et que je diminue »(Jn 3, 30), car c’est le Seigneur, à travers lui, qui trace son chemin dans lavie de celui qui est accompagné.Pour l’accompagné comme pour l’accompagnateur, un chemin de sanctification se vit.Accompagnerpour aiderà déjouer le Malindans nos viesL’accompagnement se révèle nécessaire pour que la personne puisseéviter certains pièges, être soutenuequand les obstacles rencontrés ladésorientent.Connaître ses failles est d’une grandeutilité, car c’est là que le Malin se feral’oiseleur, essayant de nous prendredans ses filets. Il est nécessaire, quand« la boue » remonte, d’être accompagné de ne pas rester seul avec la partiesombre de sa personne au risque dese décourager, de perdre sa libertéintérieure, sa capacité de discernement, particulièrement quand noussommes confrontés à des événementsqui se répètent et provoquent lesmêmes lieux sensibles jusqu’à créerun mal-être, un malaise diffus.Quitter cette loi du péché demandeà suivre un chemin de vérité sur soi,qui peut être long et ardu. Il est quelquefois nécessaire d’accepter de seposer la question d’une aide appropriée d’ordre psychologique, par unspécialiste, quand les troubles ressentis relèvent non plus d’une aidespirituelle mais médicale.Toutefois, certaines grâces opèrentdans le psychisme, des transformations que nos techniques mettentparfois des années à obtenir : Dieuest vivant ! Donnons-lui l’occasion derejoindre ses enfants.Accompagnerpour vivredavantageen plénitudeavec le SeigneurIl nous faut toujours garder présent àl’esprit que l’enjeu de l’accompagnement est la conversion, le but étant detendre vers le Royaume par des chemins sûrs et d’en hâter le temps. Carnous ajuster à la volonté du Seigneuret vivre en communion avec lui estce en quoi l’âme trouve sa joie et sonrepos.

L’EXPÉRIENCEde P. Patrick Sempère,prêtre du diocèse de Parisau service des Foyers de CharitéDans le dialogueavec un autre, discernerl’amour de DieuPrêtre du diocèse de Paris, le père Patrick Sempère a été directeur du Séminaire et vicaire à la paroisseSaint-Denys-du-Saint-Sacrement, tout en étant aumônier de l’association Aux captifs la libération.Le point commun de ses fonctions est que le père Sempère est un véritable ministre de l’écoute. Il estactuellement au service des Foyers de Charité, exerçant au foyer Notre-Dame-de-Lacépède, près d’Agen.Les Foyers de Charité sont des lieux où, en unesemaine, dans le silence, les fondements de la foisont présentés aux retraitants. La finalité de cetteretraite spirituelle appelée « Retraite fondamentale » est de susciter une rencontre renouveléeavec le Dieu vivant. Au cours de cette semaine,la rencontre avec un prêtre ou un écoutant permet de clarifiercomment Dieu vient frapper à la porte. Cette rencontre se situedans ce que l’on pourrait appeler « la vie dans l’Esprit ». En effet,la personne humaine, et alors son agir, s’enracine dans le don del’Esprit. « Le Seigneur Dieu modela l’homme avec la poussière tiréedu sol. Il insuffla dans ses narines le souffle de vie et l’homme devintun être vivant » (Gn 2, 7). Pourtant, depuis l’origine, un combat sedéroule entre « la chair et l’Esprit » (cf. Rm 8 et Ga 5). La chair,c’est l’homme qui se laisse guider par ses propres aspirations,même pour suivre Dieu. En chacun de nous, il y a ce qui vient dumauvais Esprit, qui sait se faire passer pour l’ange de lumière. Ily a ce qui vient de notre propre esprit qui, même en voulant fairele bien, peut se tromper. Enfin, il y a ce qui vient de l’Esprit Saint,qui devrait toujours, à l’image du Christ, être notre premier choix.Or, à quoi nous pousse l’Esprit ? Il nous pousse à aimer commeDifficile de percevoir, seul, le don que Dieu nous fait. L’accompagnementspirituel, à travers la rencontre avec un prêtre ou un écoutant, aideà discerner l’amour de Dieu à notre égard.Dieu lui-même aime : « Aimez-vous les uns les autres comme JEvous ai aimés » (Jn 13, 34). Le problème est que l’amour deDieu, à l’image de Dieu, se vit dans la pauvreté de cœur, dansles larmes, dans la douceur, dans la soif de justice, dans la miséricorde, dans la pureté de cœur, dans la paix, et même dans lapersécution (cf. Mt 5). Il est doux et humble, discret. Comme Dieucaché en ce monde, il est caché dans le cœur de l’homme. Sansoublier que ce cœur de l’homme est lent à croire et même endurci.Se laisser éclairerpar la lumière de DieuAinsi, pour discerner l’amour de Dieu qui se donne, qui seprofesse, qui se refuse aussi, en nos pensées, en nos paroles,en nos actions et en nos omissions, la lumière de Dieu estnécessaire. Seul Dieu peut conduire à Dieu. « Par ta lumièrenous voyons la lumière », dit le psaume 36. Et cette lumière esttoujours donnée par des médiations, car nul ne peut voir Dieuface à face. L’enjeu de l’accompagnement spirituel est là : dansle dialogue avec un autre, trouver le don que Dieu fait dans lajoie ou la peine, vécues ici et maintenant. Ce que Dieu donne,c’est toujours l’Amour. Mais, laissés à nous-mêmes, nous nesommes pas toujours en mesure de nous en rendre compte.Dans l’accompagnement spirituel, il ne s’agit donc pas d’abordde discerner comment mieux faire le bien. Il ne se situe pas auniveau de la morale. Il consiste à mieux percevoir l’amour deDieu pour moi, en tout ce qui est vécu, pour mieux y répondre.Il ne s’agit pas tant de connaître que de mieux aimer Dieu,les autres et soi-même, car « la connaissance rend orgueilleux,tandis que l’amour fait œuvre constructive » (1 Co 8, 1).Qu’il y ait en nous des combats, visibles ou invisibles, estinhérent à la vie de ce monde. Il ne faut pas s’en émouvoir.L’important dans ces combats, quels qu’ils soient, est de pouvoir y reconnaître l’amour de Dieu qui est toujours un cheminde lumière. Telle est la vie spirituelle : laisser l’Esprit Sainttoujours plus libre d’agir en nous pour qu’en tout, nous soyonsde plus en plus configurés au Christ, capables d’aimer commeil aime. Là se trouvent la vraie liberté et la vraie joie. diaconat aujourd’hui n 209 15

DOSSIER L’accompagnement spirituel, une écoute sous la lumière de DieuL’EXPÉRIENCEd’Olivier Le Rendu,diacre du diocèse de Nantes,médecin psychiatreDistinguer thérapieet accompagnementspirituelOlivier Le Rendu, diacre, est médecin psychiatre à Nantes où il exerce en libéral depuis plus de trente ans.Il n’est pas accompagnateur spirituel, mais il a exercé pendant plusieurs années la supervision du servicede l’exorcisme. Grâce à son expérience de praticien, il nous explique la différence entre le domainede la thérapie et celui de l’accompagnement spirituel.Je rencontre dans mon travaildes chrétiens parfois envoyéspar leur accompagnateur spirituel. Le thérapeute que je suis,dans ses techniques – je suisde formation thérapies brèves,centrées sur les solutions –, va essayerd’entrer dans le monde de l’autre, c’està-dire essayer de comprendre de l’intérieur son fonctionnement. Donc, pourles chrétiens qui souffrent de difficultés, d’entrer dans leur monde qui, bienqu’ayant les mêmes références que lemien, puisqu’il se réfère à l’Évangile,est différent du mien. Il m’arrive aussidans ma pratique avec les chrétiens,mais pas que, d’utiliser des métaphoresde l’Évangile ou de l’Ancien Testamentpour entrer dans leur monde et les aiderainsi à réfléchir mais sur leur humanité et les aider à prendre position face àleurs difficultés. Les patients s’exprimentsans mal sur leurs difficultés spirituelles,mais le thérapeute ne doit pas s’égarer, ilne doit pas chercher à entrer dans la vieproprement spirituelle de la personne.Par exemple, j’ai soigné un homme quisouffrait beaucoup, il avait des obsessions qui se manifestaient par desvisions et des pensées horrifiantes, bestiales à thématiques sexuelles sur lescomportements supposés de Jésus et deDieu. Il se sentait très coupable, il pensait qu’il blasphémait. Il voulait recevoirle sacrement du pardon et sollicitait enpermanence son accompagnateur spirituel, qui me l’a finalement adressé.16 diaconat aujourd’hui n 209Les pensées de cet homme, prises surle seul plan spirituel, ne pouvaient êtreque dramatiques pour son salut. Elles lefaisaient d’ailleurs culpabiliser. Mais, surle plan psychiatrique, de telles penséessont bien banales : il s’agit de troublesobsessionnels idéatifs dont le traitementest assez codifié. Sur le plan spirituel, lapremière décision à prendre est de refuser, en ce cas, de donner le sacrement dupardon ; en effet, ce refus par le prêtre vasignifier que le problème n’est plus del’ordre du spirituel, mais que les troublesrelèvent du registre psychiatrique. Ainsi,la responsabilité ne se situe plus surle plan spirituel mais bien sur le planhumain, celui de la maladie, et il faudraalors accepter des soins. Ces pensées, cesimages sont involontaires – on dit « intrusives ». La personne lutte de toutes sesforces contre, mais sans y arriver et pluselle lutte, plus elles s’imposeront à lui.Alors comment discerner ? Le thérapeute, tout comme l’accompagnateurspirituel, essaie de rentrer dans lemonde de l’accompagné. Et discernerce qui revient à l’un ou à l’autre, c’estassez simple : il s’agit d’accueillir ladémarche de celui qui vient dans sondomaine reconnu : le pathologique chezle thérapeute, le spirituel chez le prêtre.Toutefois, cette démarche peut ne pasêtre toujours facile pour les patients :ainsi à l’exorcisme, où sont accueilliesbeaucoup de personnes souffrant detroubles, il est tentant de les renvoyervers un « psy », alors que, pour ces personnes, venir au service de l’exorcismeest une démarche spirituelle. Il paraîtdonc important ici de bien le manifesteret de leur dire que leur combat spirituelc’est peut-être d’accepter un suivi, ouun traitement, puis de prier avec ellesou près d’elles.Il est essentiel, finalement, de réfléchirsur le domaine de la demande de la personne et ainsi d’éviter des confusionsdommageables. Pour discernerce qui revient au thérapeuteou à l’accompagnateurspirituel, il s’agit d’accueillirla démarche de celuiqui vient dans son domaine reconnu :le pathologique chez le thérapeute,le spirituel chez le prêtre.

Lors d’une session de la formationà l’accompagnement spiritueldans le diocèse de Vannes.Accompagner, c’est fairebrûler l’huile de nos lampes !Le diocèse de Vannes a dégagé des orientations entre 2010 et 2014. Un parcoursde formation à l’accompagnement spirituel a ainsi vu le jour. Sr Adèle Coué a étémissionnée pour réaliser ce projet. Avec du recul, elle nous en fait entrevoir les fruits.De plus en plus de personnes demandent à être accompagnées spirituellement avec des besoins divers, mais toutesont une visée précise : obtenir une aide pour progresserdans leur vie humaine et spirituelle afin de mieux vivre en discipleset en témoins du Christ. Une équipe s’est donc constituée avec troisprêtres, deux sœurs consacrées et une laïque. Les candidats à cetteformation doivent être envoyés pour se former « à cet “art de l’accompagnement”, pour que tous apprennent toujours à ôter leurs sandalesdevant la Terre sacrée de l’autre (cf. Ex 3, 5) » (La joie de l’Évangile,n 169). De l’expérience acquise par les participants, se dégagent lespistes suivantes.Dieu veut faire alliance avec l’hommeTout homme est une histoire sacrée, comme nous le chantons, et il estpossible à l’homme de se hisser à ce niveau, de répondre à l’allianced’amour que Dieu nous propose. Le Dieu des chrétiens est un dieude communication. Par sa parole faite chair, il entre en dialogue avecnous. Il nous enseigne. Nous devons nous appliquer à le connaîtreet à mieux découvrir combien sa présence est vivante, agissante etcréatrice. Aussi, l’accompagnateur aide à faire prendre conscience àcelui qu’il accompagne combien l’intensité de la présence du Seigneurnous porte vers la vie et nous aide à quitter nos lieux mortifères.Le p

Dans une perspective chrétienne, l'intériorité est le lieu d'une expérience spirituelle de rencontre, et non pas une mode ou une réalité dont un missionnaire pourrait se dispenser. Dans la tradition de l'Église, l'expérience intérieure conduit à ces-ser de considérer la foi comme une relation avec un Être extérieur à nous qui s'ajoute à notre existence pour la .

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