THOMAS EDWARD LAWRENCE - Editionslibretto.fr

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THOMAS EDWARD LAWRENCEL ES SE PT PILIE RSD E LA SAG ESSETome ITraduit de l’anglais paréric chédaillePréface dejeremy wilson

Titre original :The Seven Pillars of Wisdom The Seven Pillars of Wisdom Trust, 1997, 2003. J. and N. Wilson, 1997, 2003, 2014. Nicole Wilson / Castle Hill Press, pour la préface et la présente édition. Éditions Phébus, Paris, 2009, pour la traduction française.IS B N : 978-2-36914-527-1

LES DEUX VERSIONS DES SEPT PILIERSDans le manuscrit des Sept Piliers de la sagesse déposé à laBodleian Library figure une note de T. E. Lawrence précisant qu’il entama l’écriture de la première version du textele 10 janvier 1919 et l’acheva le 25 juillet. Cependant, ennovembre de la même année, son œuvre, excepté l’introduction et le brouillon des livres IX et X, lui fut volée à la garede Reading. Au début du mois de décembre, il entreprit deréécrire minutieusement les parties manquantes, mais perdit vite courage et finit par y renoncer. Quelques semainesplus tard, exhorté par ses amis, il recomposa à la hâte le texteperdu, tant qu’il l’avait encore présent en mémoire. « 95 % enfurent rédigés à Barton Street en l’espace de trente jours 1. »Il acheva cette seconde version – « un texte exécrable 2 » – le11 mai 1920, pour ensuite, au cours des deux années suivantes, y apporter corrections et ajouts.Tout en avançant dans ce travail de retouches, Lawrenceprocéda à une révision « des plus soigneuses 3 ». Il entreprit cetravail le 1er septembre 1920 et le termina le 9 mai 1922. Cemanuscrit, qu’il confia à la Bodleian Library, est la version1. Note sur l’historique des Sept Piliers de la sagesse, manuscrit dela Bodleian Library.2. T. E. Lawrence, Some Notes on the Writing of Seven Pillars of Wisdom and Revolt in the Desert (1927).3. Ibid.7

maîtresse des Sept Piliers. Pour éviter de perdre une secondefois le texte, il en fit imprimer huit exemplaires, composéssur deux colonnes, à l’imprimerie de l’Oxford Times, jugeantcela moins onéreux qu’un recours à la dactylographie. Toutefois, pour éviter le coût du correcteur maison, il corrigea luimême chaque exemplaire à la main. Ce faisant, il procéda àdes centaines de changements. Ces derniers sont inclus dansla présente édition, où l’on a également pris soin de rectifierde nombreuses erreurs et omissions lui ayant échappé dansle tirage de l’Oxford Times.À l’époque où il mit la dernière main à ce travail, Lawrence souffrait d’une dépression en partie liée aux expériencesatroces qu’il avait traversées durant la guerre, et qu’il allaitrevivre en cauchemars jusqu’à la fin de sa vie. Mais il étaitaussi mentalement épuisé. « À Londres, ce printemps, j’ai failliperdre la raison en m’escrimant sur ce satané bouquin 1 »,écrivait-il en novembre 1922.Lawrence s’était peu à peu laissé gagner par l’idée obsédante que le texte n’était pas suffisamment bon pour êtrepublié. Son ambition était d’écrire un classique de la littérature mondiale, une œuvre qui pût voisiner avec Moby Dick etLes Frères Karamazov. Or, Les Sept Piliers était selon lui « troplong et sans structure 2 ». Il pensait pouvoir l’améliorer en leretravaillant ; mais avant de s’y essayer, il lui fallait laisser sesidées « quelque temps en jachère 3 ». Le singulier remède qu’ilse prescrivit fut de s’engager dans l’armée, cela sous un fauxnom. Enrôlé au sein de la R.A.F., il fut rendu à la vie civile àla fin de 1922, lorsque la presse révéla son identité. Incertainquant à son avenir, il discuta avec Jonathan Cape de la possibilité de publier la version d’Oxford des Sept Piliers, puis y1. Lettre à Robert Graves (12 novembre 1922).2. Lettre à Eric Kennington (16 février 1922).3. Ibid.8

renonça brusquement. En mars 1923, il se rengagea, cettefois dans le Tank Corps.Loin de s’améliorer, son état psychologique donnait àses amis de réels motifs d’inquiétude. Comptant que celalui occuperait l’esprit, ils le persuadèrent de consacrer sesheures de liberté à la préparation d’une édition de luxe, parsouscription, de son œuvre. Le texte d’Oxford était troplong pour tenir en un seul volume imprimé sur papier artisanal ; néanmoins réduction et révision seraient des tâchesconstructives. On est en droit de se demander si ce projet était bien judicieux. En 1924, le goût de Lawrence seportait vers une écriture beaucoup plus simple, alors quele style des Sept Piliers était résolument d’avant guerre. Lerelisant d’un œil critique après plus d’une année, il le jugea« malsain 1 ». Et d’ajouter : « Cela différait incroyablement dece dont je pensais que mon talent (dont j’avais trop hauteopinion) accoucherait 2. » Pis encore, revoir le texte lui remiten mémoire des souvenirs de la guerre qu’il était désireuxd’oublier.Plongé dans un état de dépression qui allait empirant, larévision du texte lui coûta plus qu’il ne l’aurait imaginé. Aubout de six mois, il écrivait : « Je tâche de raccourcir de 10 %ce texte indigeste. Le plus simple est de retrancher dix-huitlignes des cent quatre-vingts de chaque page à double colonnede la vieille édition ; mais la méthode la plus simple ne marchepas toujours. [ ] Ce qui est relaté dans ce livre m’est devenuétranger et lointain, si bien que je n’y puis que tailler et rapiécer 3. » Il affirma plus tard que, à quelques exceptions près,les critères de sa révision avaient été purement « littéraires 4 »1. Lettre à Henry Williamson (2 avril 1928).2. Ibid.3. Lettre à Charlotte Shaw (10 juin 1924).4. T. E. Lawrence, Some Notes on the Writing of Seven Pillars of Wisdom and Revolt in the Desert (1927).9

– terme tellement vague dans ce contexte qu’il pouvait justifier chacune de ses interventions.La comparaison entre le texte d’Oxford et la version abrégée destinée aux souscripteurs révèle qu’il fit plus de coupesdans la seconde moitié. Il affirma ultérieurement avoir enparticulier abrégé le livre VIII , parce que les lecteurs de laversion d’Oxford avaient trouvé trop longue la période deflottement précédant la marche finale sur Damas. Toujoursest-il que ces coupes contribuèrent à altérer la narration historique. De plus, le livre VIII ne fut pas le seul à subir detelles retouches.Version d’OxfordIntroductionLivre ILivre IILivre IIILivre IVLivre VLivre VILivre VIILivre VIIILivre IXLivre XVersion diminuée16 67323 91125 83130 09243 58136 57535 24828 67823 25625 93645 785334 56613 83620 05520 53925 41134 41126 52428 59520 42912 21717 42631 154250 579Différence-17 %-16 %-17 %-16 %-21 %-27 %-19 %-29 %-47 %-32 %-31 %-25 %Dans la même lettre, Lawrence parlait de raccourcir letexte de 10 %. Plus tard, quand la version destinée à êtrepubliée par souscription fut achevée, il écrivit qu’elle étaitde 15 % plus courte que l’original 1. Le pourcentage exactétant de 25 %, ces affirmations conduisent à s’interroger1. T. E. Lawrence, Some Notes on the Writing of Seven Pillars of Wisdom and Revolt in the Desert (1927).10

sur sa façon de calculer la quantité de texte à retrancher.On sait par ailleurs qu’il ne brillait pas en arithmétique.Lorsqu’il citait des chiffres, ceux-ci étaient souvent, commeici, incorrects. Si ses estimations de départ sur la longueurdu texte étaient fausses et qu’il eût trop peu raccourci lespremiers livres, il n’y avait pas de solution. L’impressiondu texte destiné à paraître par souscription prit du temps– deux pages par deux pages – et fit l’objet du plus grandsoin. Sitôt qu’il terminait d’effectuer des coupes sur un livre,ce dernier était composé, corrigé sur épreuves et imprimé.L’opération s’étala sur deux ans et demi.Lawrence avait dans un premier temps décidé que ce texteserait abrégé de 250 000 mots. Chiffre sur lequel l’imprimeurbasa son estimation, et proche de ce à quoi l’auteur arrivaen définitive. Une fois réglée la question de la maquette,on sut le nombre total de pages que le volume représenterait. Lawrence avait peut-être mal évalué l’importance descoupes auxquelles il lui fallait procéder, mais la pile grandissante des parties déjà imprimées attira certainement sonattention sur cette question. Il n’était pas envisageable deréimprimer la moitié du livre. C’est pourquoi, s’il devaitnéanmoins rendre un texte de la longueur annoncée, la seulesolution fut de multiplier les coupes dans les derniers livres.Quoi qu’il en soit, on ne peut douter qu’une telle entreprise parût déprimante à son auteur. En juin 1925, il envoya àEdward Garnett la révision du livre VI , qui renferme l’incidentde Deraa, en lui laissant clairement entendre son intentionde mettre fin à ses jours sitôt le travail terminé. Ce n’était paslà un état d’esprit propice à la révision du texte. Certainesde ses lettres donnent d’ailleurs à penser qu’il ne se souciaitpratiquement plus de laisser une œuvre littéraire. Au lieu decela, il se concentrait sur des détails de mise en page. Ainsi,il lui arrivait fréquemment de retrancher ou d’ajouter desmots afin de s’assurer que les pages commenceraient par un11

nouveau paragraphe et que ces derniers se termineraientprès de la marge de droite.Après la parution de l’édition par souscription, presquetoutes ses déclarations concernant les Sept Piliers furentpour dénigrer le livre. Il semblait toutefois ne pas savoirlaquelle des deux versions était la meilleure. Parmi ceuxqui lurent les deux textes, Robert Graves préférait le texted’Oxford : « L’écriture, plus relâchée, rend la lecture dutexte plus aisée. D’un point de vue critique, nul doute quela version revue est meilleure. Il n’est pas possible qu’unhomme comme Lawrence ait passé quatre années à polirun texte sans l’améliorer, mais la rigueur nerveuse offertepar la version révisée aura apparemment endormi mon jugement critique 1. »E. M. Forster, qui avait soumis des suggestions à Lawrence pendant son travail de révision et avait par conséquentdes raisons de préférer la nouvelle version, étudia les deuxtextes en 1931. « Force m’est d’admettre, conclut-il, que lesphrases de la version revue sont plus concises et mieux tournées, et témoignent d’un plus grand souci des fonctions etincidemment de l’étymologie des mots employés. Mais larelation entre les phrases me paraît en avoir pâti ; la correction, quoique logique, ne fut pas toujours facile 2. »Bernard Shaw déplorait, pour sa part, le temps passé parLawrence à bichonner un livre qui était déjà magnifique. Ilavait néanmoins profité de la révision pour engager l’auteurà atténuer certaines attaques personnelles.Tant que le texte d’Oxford est demeuré inédit, peu d’autrescritiques ont été à même de se faire une opinion. À l’époqueoù il recherchait des souscripteurs, Lawrence avait promis1. Robert Graves, Lawrence and the Arabs (London, Jonathan Cape,1927).2. Lettre de E. M. Forster à T. E. Lawrence (18 janvier 1931).12

qu’il n’y aurait de son vivant aucune autre édition des SeptPiliers. Le manuscrit déposé à la Bodleian garantissait cependant que les deux versions lui survivraient.T. E. Lawrence mourut le 19 mai 1935 à l’âge de quarantesix ans, suite à un accident de motocyclette. L’événement eutun énorme retentissement dans la presse. Six semaines plustard, le 19 juillet, était mise en vente une luxueuse éditiondes Sept Piliers. Seule la version abrégée pouvait être publiéedans d’aussi brefs délais. À ce jour, l’index, composé à lahâte, n’en a jamais été amélioré.Le texte d’Oxford avait été évoqué dans au moins unebiographie largement diffusée, aussi son existence était-ellebien connue. On conçoit que les éditeurs aient eu le soucide ne pas perdre des ventes, comme c’eût pu être le cas si lepublic avait attendu la parution d’une version plus complète.Le dos de la jaquette de l’édition Cape de 1935 proclame :«Version intégrale ». Et la préface d’expliquer de façon peuencourageante : « Les derniers exemplaires du texte impriméà Oxford en 1922 existent toujours, mais il ne seront pas rendus publics avant au moins dix ans, et alors seulement dansune édition limitée 1. »Quelques critiques protestèrent. Le spécialiste de l’ArabieH. St. J. B. Philby écrivit dans le Sunday Times : « C’est [letexte d’Oxford] que nous voulons plutôt que l’édition parsouscription qui nous est actuellement proposée 2. » À la radioet dans le Listener, E. M. Forster confirma ce que Lawrencedevait subodorer : « l’“Oxford” est, de l’avis de plusieurs critiques, encore supérieure à la version aujourd’hui en circulation, et l’on est heureux d’apprendre qu’une réimpression1. T. E. Lawrence, Some Notes on the Writing of Seven Pillars of Wisdom and Revolt in the Desert (1927).2. H. St. J. B. Philby, article paru dans le Sunday Times (28 juillet1935).13

pourrait enfin voir le jour 1. » Le texte d’Oxford n’allait êtrepublié que soixante-deux ans plus tard.Ayant relu plusieurs fois les deux textes alors que je travaillais à cette édition et à la biographie officielle, je partage lesavis exprimés par Forster et par Graves. Dans l’ensemble, letexte d’Oxford s’exprime avec plus de naturel. Lorsque l’onabrège un document, il est facile d’en endommager le stylecoulant. Le résultat : un texte où des phrases bien construitesne s’articulent pas harmonieusement est parfois qualifié de« granuleux ».Quelles que soient les qualités littéraires de chacune desdeux versions, si les Sept Piliers vous intéresse au plan del’histoire, de la littérature de voyage ou de l’autobiographie,vous devez assurément préférer le texte d’Oxford : il est d’untiers plus long que l’édition par souscription et contient toutesorte de choses intéressantes que l’on ne trouve pas danscette dernière.JEREMY WILSON1. E. M. Forster, article paru dans le Listener (31 juillet 1935).

Mr. Geoffrey Dawson persuada leAll Souls’ College de m’accor der letemps d’écrire ce livre.Et Mr. Herbert Baker m’offrit àcet effet l’usage de parties de sesmaisons.

À S. A.Je t’aimais, aussi me suis-je fait maître de ces flots de combattantset ai-je inscrit ma volonté sur les cieux étoilésAfin d’arracher ta Liberté, l’auguste maison aux sept piliers,De sorte que ton regard fût brillantLorsque j’arriverais.La mort fut en chemin ma servante, cela jusqu’au moment où,approcha

LES DEUX VERSIONS DES SEPT PILIERS Dans le manuscrit des Sept Piliers de la sagesse déposé à la Bodleian Library figure une note de T. E. Lawrence préci-sant qu’il entama l’écriture de la première version du texte le 10 janvier 1919 et l’acheva le 25 juillet. Cependant, en novembre de la même année, son œuvre, excepté l’introduc -

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